Je viens de m’arranger avec Honorine1 pour acheter la portion de son héritage & je me flatte qu’à présent que nous ne sommes qu’entre nous deux, nous pourrons parfaitement nous entendre.
Tu désires ma chère amie jouir de la possession de Gémenos, je ne m’y oppose pas mais comme le reste de prix de f 9775 qui est encore dû à M. Rocoffort2 y met un empêchement, il faut que tu l’aide à payer cette somme. Je ne toucherai rien des rentes qui me reviendront et de ton côté si tu mets de l’économie dans ta dépense & que tu fasses payer par Samat3 le surplus des produits de Gémenos dont tu n’auras pas besoin à notre bon ami M. Hyacinthe Daniel4, il emploiera cet argent à payer peu à peu cette dette.
Tu verras s’il te convient de louer la campagne de Gémenos après le bail qui a été fait pour augmenter ton revenu & si tu y plaçais quelques amies ce serait un agrément & un bénéfice qui rapprocherait le moment où Gémenos sera sans lien d’hypothèque.
Tu me feras le plaisir pour simplifier l’administration d’Hye Daniel & le mettre à même de remplir le contrat que j’ai fait avec Honorine, de ne plus prendre les f 100 que tu te faisais remettre par Alexdre Aguillon5 & tu te les feras remettre par Samat.
Si ces arrangements te plaisent sous peu d’années tu pourras jouir de Gémenos sans réserve.
Je continue mes voyages espérant toujours que le moment n’est pas éloigné où je pourrais te voir parfaitement heureuse. C’est le plus vif désir de mon cœur. Je t’embrasse.
L. Lt. Caire
Honorine Caire, épouse de François Mille et sœur de Louis Laurent Caire et d’Eugénie Caire. La troisième sœur, Victoire Caire, épouse de Paul Guigou, avait renoncé à sa part d’héritage. ↩
La maison de Gémenos a été achetée à M. et Mme Roccofort le 24 mars 1807, notaire Athanoux. ↩
Honoré Samat, méger des terres de Gémenos, il produit du blé et du vin. ↩
Négociant à Marseille et fondé de pouvoirs de Louis Laurent Caire. ↩
Je viens profiter des offres de service que vous m’avez faites pendant votre séjour à Paris, pour une affaire qui en m’intéressant en particulier intéresse en même temps le Commerce et la Nation.
Vous trouverez ci-joint copie des lettres que j’ai écrites à Mr Meifrun1, notre député à l’Assemblée Nationale et à Monsieur Malouet qui m’est fort attaché ; j’y joins copie de toutes les pièces qui y ont rapport. Vous jugerez par le détail toutes les inquiétudes que j’ai eues et que je ne cesse d’avoir. Il est certains en droits publics de la ville où on ne cesse de me calomnier. Ma vie, ma fortune et celle de mes amis est dans le plus grand danger depuis le 24 juillet dernier et je ne saurais rallumer votre amitié et votre protection dans une circonstance plus intéressante. On cherche partout à favoriser le commerce, on cherche à attirer l’abondance, personne mieux que vous ne connait les devoirs d’un commissionnaire et les suites de l’effet d’une insurrection populaire pour l’objet d’une denrée de première nécessité appartenant à des étrangers ; quelle confiance peuvent-ils avoir en nous ? s’ils ne trouvent pas des protecteurs pour leur fortune quand elle sera dans nos ports ; que ne doit-on craindre dans des moments critiques ? Nous en avons un exemple récent : sans le Royaume de Naples et Sicile, la France aurait-elle pu subsister ? Peut-on se dissimuler les obligations que nous avons eues l’année dernière à ce Royaume ? Je ne fais que vous répéter ce que vous savez aussi bien que moi. On a voulu souvent m’opposer que les blés que j’ai en magasin ayant gagné la prime, je devais les vendre au prix courants, mois la valeur de la prime. Le Gouvernement a-t-il pu jamais entendre cela ? A-t-il jamais pu entendre de sacrifier les intérêts des Étrangers qui lui ont apporté des subsistances ? N’est-ce pas l’appât de la prime qui nous a procuré tant de blé, n’est-ce pas la grande quantité qui en avait fait baisser le prix au commencement et jusque vers le 20 juillet dernier ? Combien de réflexions n’aurait-on pas à faire encore ?
Voilà, mon cher ami, le fruit de mes actes, de mes soins pour acquérir une réputation. J’ai mérité la confiance des Étrangers, j’ai attiré l’abondance, je procure journellement le débouché des marchandises du pays et il est bien douloureux pour moi à la fin de ma carrière d’éprouver les dérangements auxquels je suis exposé.
J’ai l’honneur d’être avec la plus sincère attention, Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur
Laurent Caire
PS. Veuillez bien, mon cher Monsieur, vous joindre à messieurs de Malouët, Meifrun et Millet de Mureau pour délibérer sur mon affaire et voir les moyens les plus efficaces pour engager notre municipalité à rendre public ma conduite, ainsi que mes divers comparants l’en ont supplié et ce quelle n’a pas encore fait. J’attends avec impatience votre chère réponse2.
Notes et références
Source : Transcription de George Ladevie qui ajoute : (Voir dossier Foulchier / Fargier) Laurent Caire est soumissionnaire à Toulon. En 1832, son fils Louis Laurent devait épouser une fille du général Pascalis, mariage négocié par Jean Abeille. Plus tard, Henri, arrière-petit-fils de Laurent devait épouser [Marcelle] l’arrière-arrière-petite-fille de Jean Abeille.
Pierre-Joseph Meyffrun ou Meifrun, né à Toulon le 23/02/1723, décédé à Toulon le 17/05/1814, député de l’Assemblée Constituante ↩
Une lettre ouverte du 7/08/1790, signée du Maire, Mr Richard, de quatre conseillers et de Mr Serres le jeune substitut dément formellement les bruits qui courent accusant Mr Caire d’accaparement des blés. La lettre doit être affichée. ↩
Château d’Unang Extrait du livre de Marie-Thérèse Jouveau sur Joseph d’Arbaud
Caractéristiques. Site. Description générale.
Château d’agrément, constitué par de grands bâtiments, sans style proprement dit : une résidence provinciale, où vécut une noble famille.
Située dans un site pittoresque, à un kilomètre et demi de Malemort, sur la route de Méthamis (à droite à quelques centaines de mètres) au bord d’un vallon ombragé. Quelques terres de culture, mais […] des bouquets de gros chênes, quelques cyprès, et autour du château, de grands platanes très décoratifs.
Le château est une vaste bâtisse. A l’arrivée, par le chemin tortueux et vallonné, on débouche sur une sorte d’esplanade, avec au centre, comme sobre motif d’ornement, un palmier entouré d’une corbeille de lierre.
On a en face de soi la façade latérale du château, qui sert d’entrée. Un porche, perçant de part en part cette aile latérale, et laissant voir en perspective la terrasse, ou plutôt, l’allée qui brode le bâtiment central, avec, au fond, les escaliers de la petite chapelle gothique où reposent maintenant les corps du marquis de Raphélis Soissans, mort aux zouaves pontificaux, ceux de la marquise que nous avons connue et de sa fille Edgarde, ainsi que les corps du père Simiani, du père Magne.
Le porche finit par une grille en fer forgé, et un vestibule en arceau, de plein pied avec le sol, pavé, donnant entrée à droite aux escaliers de ces dames. La fenêtre au-dessus est celle de « la bibliothèque », appartement de petites dimensions où se tenaient généralement ces dames, dont on apercevait ordinairement à l’arrivée la silhouette dans l’encadrement des rideaux…
Cette façade latérale constituait l’une des deux ailes du bâtiment. Elle se prolongeait à droite par une tourelle entourée de lierre, puis par des appartements de service, avec à l’angle une seconde tourelle dont la porte donnait sur l’esplanade, et où furent aménagés plus tard des appartements pour M. l’aumônier (l’abbé Sautel, l’abbé Camicar). En bordure de l’esplanade, sur la droite, des écuries et autres dépendances où logeaient les fermiers.
Le bâtiment principal était constitué par une série d’appartements en enfilade, donnant une perspective curieuse : dans l’un de ses appartements, au rez-de-chaussée, se trouvait la salle à manger où l’on pouvait admirer un magnifique buffet Renaissance, orné de cariatides, à la sculpture remarquable et finement fouillée, attribué d’ailleurs par certains à Jean Goujon, et dont on avait vainement offert à Mme de Soissans un million…
Au premier étage, autre appartements en enfilades, salons ? et chambres…
L’antichambre de ce premier étage, que l’on traversait au sorti des escaliers, et d’où, par quelques autres marches, on accédait dans la « bibliothèque », servit de salle à manger après la mort de Mlle Edgarde…
C’est en ce premier étage qu’avait été aménagée une chapelle intérieure d’hiver, très intime, où les corps de Mlle Edgarde, du père Magne et de Mme reposaient après leur mort, et où furent des messes […] présent.
La façade principale donnant sur la place : une longue bâtisse, percée régulièrement de portes et de fenêtres. Au devant, une allée bordée de beaux platanes, et de rampes de buis, avec autres motifs de buis taillés avec point. Puis le parc, en plantations à palisses, progressifs, en étages, ombragées de grands arbres, où le père de Simiani s’exerça parfois au travail manuel… De grands bassins plus ou moins délabrés et délaissés.
A l’extrémité de l’allée, en limitant agréablement la perspective, la gracieuse chapelle gothique, au-dessus d’un perron de quelques marches, chapelle où j’ai célébré une de mes premières messes en juillet 1915.
Edgarde et Louise de Raphélis-Soissan – Une famille en Provence chronique photographique 1894-1914, page 218
La marquise de Raffélis-Soissan, dont le mari1 mourut très jeune, quelques temps avant la naissance de sa fille, zouave pontifical : ce qui permettait à ces dames d’avoir accès aux audiences privées au Vatican, surtout au temps de Pie X, lors de leurs voyages fréquents à Rome, où elles connaissaient le cardinal Merry Del Val.
L’une de ses expressions favorites : « C’est merveilleux ! »
Ses deux amours : le Pape et le Roy.
Un grand éloge dans sa bouche : « Il est très Action française !… »
Elle est morte à Unang, quelques années après sa fille Edgarde ; d’ailleurs, depuis la mort d’Edgarde, elle avait promis à sa mémoire de ne plus sortir du domaine d’Unang : elle tint parole.
Melle Edgarde – Marie Josèphe Louise Edgarde de Raffélis-Soissan – née le 25 mars 1866, fête de l’Annonciation, retournée à Dieu le 11 février 1916, fête de l’apparition de Notre Dame à Lourdes, donc âgée de 50 ans. Physionomie discrète, effacée, visage ravagé, sans aucun charme naturel. Mais âme très intérieure, liliale.
Elles ne s’étaient jamais quittées, sa mère et elle. Très unies, ne quittant guère Unang que pour Rome. Vie très retirée dans le site solitaire et recueilli d’Unang. De temps à autre, elles excursionnent dans les gorges de Méthamis et de Murs, accompagnées parfois d’un de leurs hôtes, suivies généralement de leur servante Eugénie ou de Ninon, la vieille nourrice d’Edgarde, portant les provisions de bouche.
Elles ont le piolet, ou plutôt l’alpenstock, à la main. et le chapeau de paille enveloppé d’un large voile telles les grandes dames d’autrefois lorsqu’elles partaient en voyage. D’ailleurs, elles ignorent les excentricités et les variations de modes actuelles, toujours vêtues à la mode d’autrefois, de longues jupes à traine, des corsages aux cols montants, et aux poimanches descendant jusqu’aux poignets, Mme la marquise à peu près toujours en couleur noire, sa fille Edgarde très souvent en blanc (ou en bleu), les couleurs préférées de la Vierge…
On respire, à Unang, une atmosphère d’autrefois, on se croit revenu d’un ou deux siècles en arrière.
Ces dames ne sont pas de leur temps, elles vivent dans un monde quelque peu irréel mais cette sorte de régression dans le passé, en leur compagnie, ne manque pas de charme et leur conversation est intéressante (Dieu et le Roi, des biographies de mystiques, des anecdotes… Elles reçoivent force revues. Elles entretiennent une vaste correspondance, elles sont en relation au moins épistolaire avec des personnalités très variées ; elles offrent même parfois l’hospitalité d’Unang à certaines d’entre elles : Joseph d’Arbaud2, Delest A.F.
Quelques personnalités rencontrées chez elles
Surtout des religieux appartenant ordinairement à des ordres divers.
Le père Magne, S. J. qui mourut à Unang et y est enseveli.
Le père de Simiani, cistercien appartenant à une grande famille d’Italie, diabétique.
Le père Paulin, long, maigre, chauve, physionomie originale. Il assura l’intérim de Malemort à la mort du bon et vieil abbé Girard.
Dom Léonce, cistercien de Lérins et de Sénanque, avec lequel nous dinâmes3, en famille à Unang, lorsque, revenant de Sénanque, il regagnait Lérins, abbé nommé mais non encore intronisé de l’abbaye de Lérins.
Vers 1914, l’aventurier qui se fit passer pour un dominicain polonais et n’était qu’un espion, garçon coiffeur ? arrêté quelque temps plus tard à Nice… Il avait été reçu par le chanoine Peyron, le père d’Alauyer, l’archiprêtre, etc et vint à Unang où il célébra la messe, communia… et confessa sans doute ces dames !
Nos visites périodiques à Unang
Mon père étant leur docteur, nous leur rendions visite au moins chaque année, au printemps généralement. Et plusieurs fois nous y dinâmes en famille.
On s’entassait sur la petite voiture, attelée de Faust ou de Bijou, deux ou trois sur la banquette avant, deux ou trois sur la banquette arrière.
Il fallait pour s’y rendre, une heure un quart environ. Lorsque nous débouchions sur l’esplanade, nous apercevions généralement ces dames derrière les vitres de leur bibliothèque. Eugénie, leur cuisinière si dévouée nous accueillait sous le porche et nous introduisait. Parfois la vieille Ninon dont le mari était le jardinier d’Unang.
Elles nous prêtaient assez souvent quelques-unes de leurs revues, notamment le Panache Blanc ou la Revue d’A. F. qui, à ce moment-là, n’était pas condamnée.
Royalistes, elles étaient pour le comte de Chambord et n’aimaient pas d’Orléans.
Pour fêter mon sous-diaconat
Elles nous invitèrent à diner chez elles. Malgré la présence du père […], je fus mis à la place d’honneur, une guirlande de fleurs ornait mon assiette. On me fit tous les honneurs, pour honorer en moi l’élu du Seigneur…
Un diner en compagnie de l’abbé Sautel, curé de Venasque
On servit un gigot faisandé qui, dès son entrée, éveilla mon odorat, notre odorat ! et me fit tout d’abord penser qu’on aller nous servir du chevreuil.
Chacun de nous s’attendait à ce que Mme de Soissan prenne l’initiative de reconnaître que vraiment ce gigot était un peu trop avancé, mais en vain ; chacun dut se résigner à y faire honneur, autant que faire se pourrait. Papa réussit cependant à en faire disparaitre une portion dans la poche de sa veste. Il n’y eut que le bon abbé Sautel[Victor Poucel a écrit une biographie : L’abbé L. Sautel, curé de Venasque (1857-1926)] qui, myope, le nez dans son assiette, mais tout à ce qu’il racontait, mangea sa portion intégralement et somme toute de fort bon appétit, sans se douter de rien.
Le plus curieux de l’affaire est que le gigot pourri ne fit de mal à personne !
Un diner dans l’antichambre, quelques temps après la mort d’Edgarde, en compagnie, je crois, de dom Léonce, abbé nommé de Lérins
Il fut caractérisé par ce fait, assez impressionnant d’ailleurs, que la porte de la chambre d’Edgarde, conservée dans l’état où elle se trouvait au jour de la mort, resta entrouverte, et que le couvert d’Edgarde et sa chaise demeurèrent à leur place habituelle, comme si Edgarde allait revenir. Il en était de même chaque jour, d’après la volonté de Mme, pour attester la présence invisible de sa fille si regrettée…
L’une de mes premières messes fut dite par moi à Unang., quelques jours à peine après mon ordination. Le vin qui me fut présenté était rouge.
Souvenir rétrospectif d’Unang à Mazan
Pour la béatification de Jeanne d’Arc, j’allais moi-même chercher ces dames à Unang, avec Faust. Melle Edgarde monta à mes côtés mais Mme de Soissan, qui ne craignait pas l’auto, conservait pour la voiture une appréhension irrésistible depuis qu’elle avait été témoin d’un accident survenu avec ce moyen de locomotion.
Mme de Soissan ne voulut pas monter et suivit la voiture qui bien entendu dut faire au pas la route d’Unang à Mazan, à pied, le bâton à la main, l’autre main tenant la voiture. On conversa aimablement tout le long du chemin.
Elles dinèrent à la maison.
Elles nous avaient prêté pour la circonstance une grande toile représentant Jeanne d’Arc à cheval, que Melle Edgarde avait peinte elle-même, et que, avec Gaston, nous fixâmes, non peine ni danger, au sommet de la maison, au-dessus de la porte d’entrée, dont la corniche était ornée de vases de géranium. De chaque côté, des drapeaux, des oriflammes, et aux fenêtres, des transparents, accessoires pour l’illumination du soir.
C’est le jour où l’abbé Archelet nous donna, à l’église de Mazan, un panégyrique si long, que j’écoutais de la tribune, et qui fut suivi d’une procession très solennelle à travers les rues du pays.
Le soir une dernière cérémonie nous réunissait à l’église dont la façade était brillamment illuminée.
Les soussignés Joseph Fournier, Florent Dessalle et Louis Laurent Caire, pénétrés de la nécessité de changer leur précédent contrat de société du 30 Xbre 1818, et d’en faire un nouveau sur des bases dont les dispositions puissent concorder et soyent en harmonie avec les règlements et lois de commerce en vigueur dans les Etats où il doit recevoir son exécution. Sont convenus, et demeurés d’accord de ce qui suit.
Article 1er. Les susnommés déclarent renouveler leur association pour les établissements de commerce déjà existant à Livourne et Trieste et connus dans ces deux villes sous la raison de J Fournier, Dessalle, Caire, et dont les opérations ont consisté et consisteront en achats et ventes de marchandises, opérations de banque, et de commerce en consignations, commissions et autres affaires commerciales.
Article 2ème. La durée de cette nouvelle société sera de trois années consécutives qui commenceront le 1er janvier 1821 et finiront le 31 Xbre 1823. La raison de commerce de l’établissement de Trieste sera Dessalle, Caire & Cie. M. Dessalle sera le seul gérant dudit établissement, et en aura seule la signature, et la libre disposition des fonds. La maison de commerce de l’établissement de Livourne sera Joseph Fournier & Cie. M. Fournier en aura la gestion et la direction. Il en aura la signature conjointement avec M. Caire.
Article 3ème. Le fonds capital de la maison de Trieste sera de florins quatre-vingt-treize mille sept cent cinquante f 93750 courants d’Auguste, et sera versé en entier par M. Florent Dessalle.
Celui de la maison de Livourne sera de piastres cinquante mille de 8/réaux en argent et le versement sera fait comme suit :
Piastres 36000 par MM. Joseph Fournier et L. L. Caire
Piastres 14000 par M. Florent Dessalle
Ce dernier ne sera que simple commanditaire dans la maison de Livourne, et ne pourra dans aucun cas être responsable au-delà de sa susdite mise de fonds d’où il suit que les deux établissements de Livourne et de Trieste seront indépendants l’un de l’autre, et que dans aucun cas la libre disposition des fonds que la maison de Trieste peut avoir actuellement et pourra avoir par la suite en compte courant dans la maison de Livourne ne pourra être contestée et refusée à M. Dessalle en raison de sa qualité de commanditaire.
Article 4. Attendu que les mises de fonds capitaux ne sont pas versées par égales portions par chaque associé, il demeure convenu qu’il sera prélevé chaque année sur les bénéfices l’intérêt de chaque versement à raison de six pour cent l’an. Cet intérêt se rapportait au débit des profits et pertes, et au crédit du compte de chaque associé en ce qui les concerne.
Article 5. Les appointements des commis, frais de bureaux, loyer de magasins et comptoirs tant à Livourne qu’à Trieste, et généralement tous les frais de commerce seront à la charge de la société, et porté au compte des profits et pertes.
Il sera tenu dans les deux établissements, en bonne et due forme, des registres, journaux et grands livre en partie double, et autres livres auxiliaires dans lesquelles il sera passé écriture de toutes les affaires de la société, et il sera fait chaque année à l’époque du 1er janvier un bilan, balance des livres, et un inventaire général dont les associés se fourniront réciproquement copie certifié.
Article 6ème. La répartition des profits et pertes constatés par le résultat de ce bilan annuel se fera de la manière suivante. Savoir 50 pour cent, soit la moitié des bénéfices nets desdits deux établissements, sera dévolu et appartiendra à M. Dessalle l’un des associés, les autres 50 pour, soit l’autre moitié, sera attribuée et répartie entre Messieurs Fournier et Caire d’après les conventions particulières établies entre eux. En cas de pertes par la maison de Livourne, elles seront supportées par les dits sieurs Fournier et Caire en proportion et à prorata de leur mise de fonds dans le dit établissement et par le dit Florent Dessalle aussi à prorata du fonds capital qu’il a versé dans ladite maison en qualité de commanditaire. En cas de perte par l’établissement de Trieste, quoique le fonds capital en ait été versé en entier par M. Florent Dessalle, il demeure cependant convenu que Messieurs Fournier et Caire les supporteront dans la même proportion que M. Dessalle se trouve exposé dans celle de la maison de Livourne, c’est-à-dire dans celle des piastres 14 000 à 50 000 piastres. Aucun des associés ne pourra demeurer débiteur par compte courant d’aucune somme excédant les articles qui s’y trouveront à son crédit et si cela échéait, il sera tenu de rembourser sans délai l’excédent à la société.
Article 7. Si par événement les pertes de l’un des deux établissements s’élevaient de manière à absorber la moitié du fonds capital de l’un d’eux, il demeure convenu que cette circonstance entraînera la dissolution de la société, et que les deux maisons ne devront plus occuper que de leur liquidation. Il en sera de même dans le cas de mort de l’un des associés que D. G.
Article 8ème. Il est entendu que les intérêts pour les fonds en compte courant seront réciproquement réglés à 6 % l’an entre les associés, et qu’ils en auront la libre disposition sans frais de commission.
Article 9. Il est interdit aux deux établissements de courir des risques maritimes, les assurances devront toujours en être souscrites, sauf un risque de deux mille florins, ou leur valeur qui leur est libre de courir.
Article 10. Messieurs Fournier Caire devront approuver, ou improuver le bilan de la maison de Trieste dans l’espace de trois mois à dater du jour où la copie leur en aura été remise. Passé ledit terme leur silence tiendra lieu d’approbation. M. Dessalle sera tenu dans le même délai après la réception de la copie de celui de l’établissement de Livourne de l’approuver ou l’improuver. Pour s’assurer de l’exactitude des comptes, les dits trois associés auront respectivement le droit pendant les trois dits mois de prendre connaissance des registres, livres et papiers de la société, mais sans pouvoir les déplacer.
Article 11. Messieurs Fournier et Caire reconnaissent que M. Dessalle a depuis longtemps versé dans la maison de Livourne la somme de piastres quatorze mille montant de sa mise sociale dans le dit établissement comme commanditaire, et qu’il a également versé la mise de fonds qui concerne l’établissement de Trieste.
Article 12. Les liquidations des affaires de la société à l’époque de sa dissolution se fera. Savoir. Pour la maison de Trieste par M. Dessalle, et pour celle de Livourne par M. Fournier. Les fonds libres au 31 Xbre 1823 et les premières rentrées seront affectées au remboursement des mises de fonds qui devra commencer dès la susdite époque et continuer à mesure que la liquidation avancera et suivant l’état de situation que chacun des susdits Messieurs Fournier et Dessalle s’engagent de remettre de quatre en quatre mois. Une fois la mise de fonds remboursée, l’on suivra la même marche pour la répartition et le remboursement des bénéfices que présentera le compte des pertes et profits de chaque établissement et les répartitions se feront tant en capital qu’en bénéfices dans la proportion de ce qui concernent chaque associé et de la manière déjà indiquée par le présent contrat.
Il est convenu en outre que la liquidation devra être terminée dans tout ce courant de l’année 1824 sauf à s’entendre sur la répartition qui pourra se faire des objets qui resteront en suspens s’il y en avait encore au 31 Xbre 1824.
S’il s’élevait quelques difficultés entre les associés pour tout ce qui a rapport à la présente société, les soussignés s’engagent de choisir des arbitres pour les mettre d’accord ; il en sera nommé de, savoir l’un par M. Florent Dessalle et l’autre par Messieurs Fournier et Caire conjointement ; ces deux arbitres auront pouvoir, en cas de partage d’avis, de se choisir un tiers arbitre pour les départager. Les parti s’engagent et se soumettent à exécuter la décision comme jugement en dernier ressort et sans pouvoir en appeler.
Article 13ème. Le contrat de société souscrit par les soussignés le 30 Xbre 1818 demeure nul et comme non avenu à partir du 1er janvier de la présente année sauf son exécution pour toutes les opérations antérieures à cette dernière époque.
Pouvoir et donner aux associés de faire approuver, enregistrer et publier le présent écrit portant partout où besoin sera.
Fait triple entre les parties sous leur signature privée, savoir par M. Fournier à Livourne le 8 janvier 1821 et par Messieurs Dessalle et Caire à Trieste le 2 janvier même année.
D’après les courriers qu’il a reçus et la copie des courriers qu’il a envoyés, voici les villes où Louis Laurent Caire est allé pour ses affaires en 1823 :
du29/12/1822 au 14/01/1823 : Guernesey
du 22/01/1823 au 24/02/1823 : Jersey
du 01/03/2823 au 20/03/1823 : Guernesey
le 21/03/1823 : Londres
du 22/03/1823 au 28/04/1823 : Guernesey
le 30/04/1823 : Jersey
le 30/04/1823 : Guernesey
du 09/05/1823 au 14/05/1823 : Liverpool
le 14/05/1823 : Londres
du 18/05/1823 au 19/05/1823 : Liverpool
du 02/06/1823 au 19/06/1823 : Manchester
du 25/06/1823 au 27/06/1823 : Londres
le 05/07/1823 : Le Havre
du 14/07/1823 au 05/08/1823 : Paris
du 21/08/1823 au 01/09/1823 : Guernesey
du 06/09/1823 au 24/09/1823 : Jersey
du 29/09/2823 au 08/12/1823 : Guernesey
A noter que cette année là, il ne va ni à Trieste voir son associé, Florent Dessalle, ni à Gemenos ou Livourne voir ses sœurs.
Charles Marcotte de Quivières nait le 28 février 1808 à Nantes. Il est le troisième enfant de Philippe Marcotte de Quivières et de Nathalie Bochet.
Le 10 septembre 1838, il épouse à Boulogne-sur-Mer Caroline Louise Augustine Adam.
Ils ont trois enfants :
Marie-Georges, née le 19 août 1839 à Boulogne-sur-Mer,
Georges Marie Albert, né le 16 septembre 1841 à Boulogne-sur-Mer,
Lucy Marie Thérèse, née le 26 juin 1843 à Boulogne-sur-Mer.
Charles Marcotte de Quivières meurt le 23 septembre 1875 à Condette.
Carrière aux Monnaies et Médailles
Charles Marcotte de Quivières est nommé à vingt ans, surnuméraire des douanes. En 1832, il est inspecteur des Finances adjoint puis au 1er septembre 1846 inspecteur de 1ère classe.
Le 28 avril, il est appelé à la tête de la Monnaie en qualité de commissaire général. Écarté par la Commune, il trouve refuge à Bordeaux, tandis que le militant socialiste Zéphirin Camélinat (1840-1932), l’un des fondateurs de l’internationale, assure la direction de la Monnaie. Avec le Gouvernement Thiers, Marcotte poursuit sa carrière et est nommé le 25 janvier 1871 premier directeur « administratif » des Monnaies et Médailles (nom de la Monnaie de Paris à l’époque) et achève sa carrière administrative à la Monnaie de Paris le 23 avril 1875.
La première pierre du bâtiment actuel quai de Conti est posée le 30 avril 1771 et la Monnaie de Paris est officiellement installée quai de Conti le 20 décembre 1775.
Il fait partie des personnalités éminentes au 19ème siècle logées à la Monnaie le temps de ses fonctions.
L’auteur
Haut fonctionnaire et homme de lettres, il effectue en 1844 et 1845 une mission d’information en Algérie sur laquelle il laisse un livre de souvenirs, Deux ans en Afrique1.
Notes et références
Sources
L’institut et la Monnaie : Deux palais sur un quai, Imprimerie Alençonnaise, 1990, pages 237 et 238
Entre mesdames Cécile Boyer et Marie Chancel d’une part et M. Pierre Massot d’autre part, il est convenu ce qui suit.
L’hoirie veuve Louis Massot donne en location à M. Pierre Massot les domaines du mas Arduin et du Bois de Silvy, à Entressen, Bouches du Rhône, pour une période de vingt années à partir de Saint Michel 1924, à raison de quatre mille cinq cents francs par an se décomptant ainsi qu’il suit : trois mille francs pour le Bois de Silvy et mille cinq cents francs pour le mas Arduin.
Mas Arduin
Au mas Arduin – Mme Gabriel Boyer (née Cécile Massot) et ses filles Adèle, Méline (Mme Dramard), Madeleine (Mme Albert Moullot), Mlles Marie (Mme Adrien Blachère) et Cécile Fabry (Mme Pierre Costier)
L’hoirie veuve Louis Massot aura à sa charge les impôts fonciers, par contre la personnelle mobilière, portes et fenêtres etc… seront à la charge de Monsieur Massot. Les redevances pour les eaux du canal des Alpines seront à la charge de l’hoirie.
Les travaux déjà effectués et payés par M. Massot, ceux qu’il entreprendrait par la suite et à payer par lui seront faits au bénéfice de l’hoirie.
Dans le cas où le bail passé par M. Massot au fermier sous locataire du Bois de Silvy à partir de St Michel 1924 et à terme le 29 septembre 1927, au prix de trois mille francs, serait à son expiration majoré ou diminué, le prix forfaitaire de 4500 francs serait à partir de la même époque augmenté ou diminué dans la même proportion.
Monsieur Massot ou ses ayant droit auront la faculté de résilier le présent bail en prévenant ses copropriétaires six mois à l’avance. Dans ce cas, le bail du Bois de Silvy serait transféré purement et simplement à l’hoirie.
Nous avons reçu hier 19 Ct six cens francs pour solder le compte des charretiers ayant transporté le sel de l’Almanarre. Parmi eux , nous avons pris note de ceux qui ont déjà touché de l’argent, tel que le nommé Ardouin auquel nous avons soldé tout compte intégralement et le nommé Blanc Victor auquel vous avez donné vous-même cent francs.
Comme Arnaud Richard a acheté les […] nous ne lui donnerons rien puisqu’il est en compte courant avec vous.
Le Capne Mancartetty dont vous nous parliez est arrivé pour prendre 70 mille que nous lui donnerons demain samedi… Il manque ce matin 100tne au Cne Thim. Nous allons faire notre possible pour les embarquer aujourd’hui.
Ce Mancartetty n’est pas le même que celui qui est parti l’autre jour. C’est son cousin. C’est celui que nous avons chargé en février pour l’Ile-Rousse… son navire est la Belle-Balagne.
Nous vous envoyons le compte des charretiers avec une annotation sur la livraison de ces sels. Thim à reçu environ 40tne de sels destinés à Roberts et que le Cne ne pût prendre. L’emploi que nous indiquons est à très peu de chose près exact… la seule différence consiste en ce que Roberts pourrait en voir reçu un peu moins et par conséquent Thim un peu plus. Mais cette différence ne dépasse pas 10 mille…
La tare de 50.000 kil que nous indiquons pour les sacs est approximative aussi vu que nous avons des sacs tellement rapiécés qu’ils pèsent trois et quatre kilo. surtout par les temps humides qui ont régné depuis longtemps.
Quelle fatalité : voilà la pluie qui commence ; il est huit heures du matin ; le soleil si beau à cinq heures et maintenant avoir de l’eau. Nous n’en finirons jamais.Dieu me pardonne !! Nous ferons prendre demain matin chez Cadière l’argent destiné aux besoins de la huitaine.
Lorsque nous aurons 150000 k sel de Capital, nous arrêterons les transports selon vos ordres.
Nous avons reçu hier 24 g.x (petitfroids) fourrage dit Luzerne de M… au prix de 3,50 le petit quintal. Total de 84 au lieu de 95 comme il l’indiquait sur son bill.
Nous avons indiqué sur l’état que nous vous remettons le nombre de jour que chaque charretier a travaillé, afin que vous puissiez voir quel profit ils peuvent avoir fait. Nous nous permettons de vous faire observer qu’il y en a qui ont de bons attelages tel que le nommé Montet. Arnaud Richard a eu quelques fois trois charrettes mais alors il avait de mauvais attelages. Ainsi la journée des charrettes n’a pas dépassé le prix que l’on paye ordinairement.
Nous vous accusons réception de 20 connaissemens timbrés.
Dans la journée de hier, les huit charrettes ont apporté 49.000 k… montant à 56.25 ce qui n’est pas extrêmement gagné pour des gens à forfait (sauf meilleur avis).
Nous avons donc besoin de les laisser continuer encore quelques jours pour ne pas être pris au dépourvu par les Corses dont vous nous avez annoncé l’arrivée prochaine.
Recevez, Monsieur, l’assurance de notre sincère dévouement.
Le château de Léoube et l’ancienne chapelle, aujourd’hui détruite
[…] J’habitais aux environ d’Hyères un vieux château, du nom de Léoubes, élevé, dit-on, par la reine Jeanne ; délicieuse retraite, complétement isolé, où, seul étranger, un brave curé des environs qui venait dire la messe le jeudi et le dimanche dans la chapelle, prenait place à notre table patriarcale.
Cette chapelle m’a rappelé un de mes vieux péchés qu’il faut que je confesse ici.
Pendant un séjour que j’ai fait1 à Toulon en 1842, la belle-mère2 de ma sœur me pria de composer pour la chapelle de Léoubes, qu’on restaurait alors, un grand tableau pour l’autel du fond.
Deux ans en Afrique – Charles Marcotte de Quivières (Manuscrit)
Elle me désigna le sujet. Elle voulait un Saint Joseph, la Vierge et l’enfant Jésus, et une foule de têtes d’anges, à la manière de Murillo. – Rien que cela.
Ces conditions posées, je fis les miennes ; et d’abord je m’opposais aux petites têtes d’anges qui me gênaient beaucoup.
Elle insista : elle tenait aux anges.
Vous arrangerez cela, me dit-elle, de manière qu’on ne les voie pas ; vous les dissimulerez.
J’acceptai la commande qui devait me rapporter une messe en musique, les bénédictions d’un grand nombre de dévotes invitées à l’inauguration, et une foule d’indulgences plénières.
Je me mis à l’œuvre. Je m’étais réservé le droit de choisir mes modèles. Une nièce de ma sœur [Zélia Vincent], avec des traits un peu accentués à la manière méridionale, avait une de ces physionomies pures et calmes qui devait inspirer mon pinceau : elle consentit à poser pour la Vierge.
Ma sœur venait de me donner un neveu, un gros garçon rose et frais, qui semblait être venu au monde tout exprès pour figurer dans mon tableau. J’avais donc mon enfant Jésus.
Mais où trouver Saint Joseph ? Je tenais à faire une œuvre consciencieuse. Je voulais que ma composition eût un cachet de vérité conforme à l’idée que certaines personnes ont conçue d’une famille composée d’une vierge, mère d’un enfant qui n’est pas le fils de son père, et d’une père qui n’est pas le mari de sa femme ; le tout cependant formant une seule et même famille.
Pendant que j’étais à délibérer, en passant la main gauche dans ma barbe, je jetai négligemment les yeux sur une glace posée en face de moi et j’aperçu… saint Joseph qui avait l’air de réfléchir profondément sur les difficultés de la situation. Je pris vivement mon crayon, et je croquai, sans désemparer, mon sont Joseph qui réunit parfaitement toutes les conditions voulues pour personnage de mon tableau. J’avais un père, une vierge et un enfant de la même famille.
Quant aux têtes d’anges, après en avoir dessiné, effacé, fait et refait deux ou trois autour de mon groupe, je pris le parti de les dissimuler par un palmier qui les couvrit entièrement de ses branches.
Le fond du paysage était un site de Léoubes, de sorte que la sainte Famille avait un air tout à fait local.
Le tableau terminé, les connaisseurs de Toulon et des environs vinrent le visiter dans mon atelier. Chacun s’extasia sur la ressemblance de la sainte Famille.
Vint le tour le grand’maman. A peine eut-elle jeté les yeux sur la toile, qu’elle entra dans une dévote fureur.
Qu’est-ce que vous m’avez fait là ? s’écria-t-elle. – Le portrait de Z… ! Je ne veux pas de cela. – J’aime beaucoup ma petite fille, mais je consentirai jamais à me mettre à genoux devant elle. Ca ne serait pas convenable ; changez cette tête.
J’eus beau insister, lui développer mon système de sainte famille, lui rappeler mes conditions, elle ne voulut rien entendre.
Non, disait-elle, on n’a jamais vu une grand’mère se mettre à genoux devant sa petite fille.
Il fallut céder, et je lui promis un changement à ma vierge.
Et mes anges, reprit-elle, où sont-ils ? Je ne les voie pas.
Mais c’était chose convenue, lui dis-je ; vous m’avez recommandé d’arranger les têtes de manière qu’on ne les vît pas. Eh bien, vous ne les voyez pas ; les têtes sont dissimulées derrière ce palmier qui les abrite de son feuillage.
J’eus de la peine à la convaincre, mais je lui avais fait la concession de ma Vierge, il fallait bien qu’elle m’accorda celle de ses têtes de chérubins.
En résumé, mon tableau encadré magnifiquement fut apporté avec pompe à Léoubes, et une grand’messe en musique, accompagnée d’une distribution de médailles, consacra l’œuvre sainte du grand maître. Malgré cette sorte de canonisation, je ne puis regarder sans rire mon portrait habillé en saint Joseph, et j’avoue que j’éprouve aujourd’hui, au sujet de moi, les mêmes scrupules que la grand’maman vis-à-vis sa petite fille. Je ne puis me décider à m’agenouiller sérieusement devant moi-même.
L’auteur de cet article, Charles Marcotte de Quivières est le frère de notre ancêtre Félicité Marcotte de Quivières, épouse d’Émile Gérard. Suite à la publication de cet article, un internaute m’a communiqué un copie du manuscrit de ce texte. Le manuscrit est plus complet et plus intéressant à lire. ↩