Invention de l’allumette

Jean-Joseph-Louis Chancel

En 1805, Jean Joseph Louis Chancel, étudiant en pharmacie, invente l’allumette oxygénée1. Le procédé est peu pratique : pour s’enflammer, l’allumette devait être trempée dans une fiole d’acide sulfurique. De plus, l’humidité rendait rapidement les allumettes et l’acide inopérants.

En 1816, Louis Charles Derosne utilise la propriété du phosphore blanc qui s’enflamme au contact des substances sur lesquelles on le frotte. C’est l’allumette phosphorique.

En 1827, John Walker invente une allumette à tige de bois à friction sur papier de verre. Il produit et vend lui-même ses allumettes jusqu’en 1829.

En 1831, Charles Sauria invente l’allumette pyrogène qui s’enflamme sur toute surface rugueuse.

A partir de 1835, l’industrie de l’allumette se développe rapidement. En 1847, Joseph Toussaint Caussemille fonde à Marseille une fabrique d’allumettes et fera fortune.

Anecdote familiale

En 1885, Claire Caussemille, fille unique de Joseph Toussaint Caussemille épouse Jules Perraud. Et en 1899, Jeanne Chancel, arrière petite fille de Jean Joseph Louis Chancel épouse Henri Perraud, demi-frère de Jules Perraud. Leur père Eugène Perraud avait épousé successivement les deux sœurs jumelles Marie et Louise Caire.

Notes et références

Allumettes au XIXème siècles, les Caussemille et Cie, Anne-Marie de Raignac, Les Éditions de Bonnefonds, 2004

  1. Jean Joseph Louis Chancel, l’inventeur – Jacques Ameil – Mars 1990

Jean-Joseph-Louis Chancel (1779-1837)

Jean Joseph Louis Chancel nait le 18 décembre 1779 à Briançon1. Il est le deuxième de quatorze enfants. Son père, Jean Louis Chancel est maître chirurgien à Briançon.

Formation

Jean-Joseph-Louis Chancel

Formé par son père, JJL Chancel est agrégé par les médecins et pharmaciens de Briançon à l’âge de quinze ans :

« Nous, Maire et Adjoints de la commune de Briançon, arrondissement du même nom, département des Hautes-Alpes, certifions et attestons à tous qu’il appartiendra que la citoyen Jean-Joseph-Louis Chancel, fils à Jean-Louis Maître pharmacien, a subi plusieurs examens tant sur la pharmacie que sur la chimie depuis le douze prairial an trois, jusques au premier vendémiaire an quatre, en présence des membres qui composaient pour lors la municipalité, en encore des citoyens François Ferrus et Jean Turin, Docteurs, médecins de l’hôpital militaires de cette place, examinés par les citoyens Jacques Sylvestre, Antoine Faure, Jean Turin et Ferrus, tous pharmaciens de cette commune, lequel ayant été trouvé capable par les susdits médecins et pharmaciens examinateurs l’agrégèrent, et la susdite municipalité l’autorisa de travailler de pharmacien chimiste, lequel a dû depuis remplir les devoirs de son état à la satisfaction du public, en foi de quoi nous lui avons délivré le présent pour lui servir et valoir à ce que de raison, que nous avons signé et fait contresigner par le Secrétaire de la Mairie, qui y a posé le sceau d’ycelle.
Fait à Briançon, le deux pluviose an dix de la République Française,
Signé Antoine Ovet, Adj, Charbonnel-Salle, Adj,
Vu pour la légalisation, Briançon, le 13 ventose an dix de la République Française,
Le sous-Préfet, Signé Chaix.
 »

Ensuite Jean Joseph Louis Chancel va poursuivre ses études à Paris et obtient six certificats :

  1. Cours de chimie générale professé au Muséum par le célèbre Fourcroy en l’an VI,
  2. Cours de chimie professé à l’école gratuite de pharmacie par Bouillon-Lagrange en l’an VI,
  3. Cours de zoologie des animaux à sang rouge professé par Lacépède en l’an VII,
  4. Cours de chimie et de pharmacie à l’école gratuite de pharmacie par Bouillon-Lagrange en l’an XI,
  5. Cour de botanique au Muséum par le Desfontaines en l’an XI,
  6. Cour de chimie générale au Muséum par Fourcroy en l’an XI.

JJL Chancel suit aussi les cours du célèbre chimiste Thénard :

« Je soussigné, Professeur du collège royal de France, membre de l’Institut, certifie que M. Chancel (Jean-Joseph-Louis) a suivi avec une grande assiduité les cours de chimie que j’ai faits au dit Collège depuis 1804 jusqu’en 1806, c’est à dire pendant trois ans ; que pendant tout cet espace de temps, il a travaillé dans mon laboratoire, et qu’il a acquis des connaissances étendues et assez précises pour pouvoir en faire de justes et utiles applications aux arts.
Paris, le 3 mai 1817
Thénard »

Simultanément, il travaille comme élève en pharmacie chez Lebon et Mithouart à partir de germinal an VII (mars-avril 1799), chez Seguin pour sept mois…

Invention des allumettes oxygénées

JJL Chancel assiste à une expérience de Thénard, une répétition des expériences de Fourcroy, Vauquelin et Robert. Thénard verse une goutte d’acide sulfurique sur un mélange de chlorate et de soude, d’où inflammation.

JJL Chancel a alors l’idée de tremper un bout de bois dans un mélange de souffre, chlorate et lycopode, puis de le frotter avec un petit pinceau d’amiante imbibé d’acide sulfurique concentré. Il en parle à Thénard qui l’encourage. JJL Chancel réalise son idée : l’allumette est née2.

Dans son numéro du 12 octobre 1805, le Journal de l’Empire annonce l’invention du briquet oxygéné, ou allumette oxygénée, par JJL Chancel. Il s’agit d’un bout de bois imbibé d’un mélange de souffre et de chlorate de potassium qu’il faut plonger dans une fiole pleine d’acide sulfurique pour que la réaction chimique enflamme l’allumette.

Fin 1805 et début 1806, les briquets oxygénés de JJL Chancel sont en vente au prix de 2 francs, 3 francs et 3 francs 50 centimes chez M. Boisseau, marchand-mercier-parfumeur, 40 rue Neuve des Petits Champs et M. Niodot, marchand-papetier, 25 rue de Thionville3.

Le 20 juin 1806, JJL Chancel vend l’exploitation des briquets oxygénés à M. Primavesi.

« Contrat

Entre sieur Jean Joseph Louis Chancel et le sieur Charles Joseph Primavesi.

1° Le sieur Chancel cède au sieur Primavesi ses Briquets au nombre de quarante, la recette pour les préparer, l’abandon de ses dépôts, ses correspondants, en un mot, son fonds de Briquets, ainsi que le droit de se servir su titre de son successeur, moyennant la somme de cinq cents francs que le sieur Primavesi a payé comptant et que le sieur Chancel reconnait avoir reçue.

2° Le sieur Chancel promet de ne communiquer à personne la manière de préparer ces briquets et lui même de ne plus en fabriquer aucun pour en faire un objet de livre et de commerce, sous peine de tous dommages-intérêts envers le sieur Primavesi.

3° Le sieur Primavesi accepte cette cession et vente de fonds en bonne forme et déclare que les briquets qui se trouvent dans les deux dépôts à Paris font partie de son acquisition à compter de ce jour, réservant au sieur Chancel le droit de se faire payer le montant de la vente antérieure, ainsi qu’au dépôt de Boulogne.

4° Les deux parties contractantes ratifient et signent le présent acte, de bonne foi et l’ont échangé entre eux.
Fait double à Paris le vingt juin mil huit cent  six.

Charles Joseph Primavesi

J.J.L. Chancel chimiste inventeur des briquets oxygénés

Préparation industrielle du borate de soude

Le borax, ou borate de soude, est utilisé comme antiseptique en pharmacie ; il favorise la fusions des minerais, le vernissage du verre, la fabrication de l’émail, la conservation des aliments, le blanchiment du linge…

En 1814, JJL Chancel va à Livourne au mariage de son cousin germain François Prat, fils d’un autre François Prat originaire de Val des Près et de Marie-Anne Chancel. François Prat épouse Emilie Marguerite Chemin.

A cette occasion, il a connaissance des « Lagoni du Volterrano », lacs toscans qui laissent échapper dans la nature des vapeurs d’acide borique.

JJL Chancel propose de remplacer le borate de soude naturel importé à haut prix des Indes par du borate de soude artificiel obtenu en saturant l’acide borique des lacs de Toscane par la soude des usines française. Il est écrit au ministre de l’intérieur pour demander un droit de douane intéressant.

A son excellence le ministre de l’intérieur

Excellence

Le borax produit naturel qui nous vient de l ‘Inde coute à la France de fortes sommes, il y aurait une grande économie d’introduire dans le commerce l’acide borique, principe constituant de ce sel, que fournissent l’eau de certains lac étrangers à notre sol par leur évaporation […]. Cet acide combiné avec la soude de nos fabriques constituerait le vrai borax du commerce qui pourrait se livrer aux consommateurs à un prix plus modéré que celui qui nous vient de si loin. Mais pour que notre commerce puisse y trouver cet avantage, il est de rigueur que l’administration de la douane soit autorisée d’en favoriser l’importation sous les plus faibles droits possibles. Ce produit naturel qui n’a pas subi plus de préparation que le borax ancien, dont l’entrée est permise, n’est pas tarifé. C’est pourquoi je viens supplier votre excellence d’en faire fixer les droits par assimilation au borax brut, vous offrant si besoin est de présenter à la chambre constitutive un échantillon de cette nouvelle substance naturelle et d’y donner de plus amples renseignements pour prouver tout l’avantage qu’en retirera le commerce français si on a égard à ma demande, ce qu’attendant de votre bonté. J’ai l’honneur

12 avril 1817

Il obtient une dérogation, attend l’accord définitif et apprend d’un de ses frères installé à Marseille que des barriques d’acide borique ont été débarquées à Marseille : Par suite d’une indiscrétion, François Larderel l’a devancé en louant les lacs pour son propre compte. François Larderel fera fortune et sera anobli !

JJL Chancel soupçonnera son protecteur Thénard d’être à l’origine de la fuite.

En 1933, il demande une indemnité pour avoir été le premier à avoir eu l’idée de fabriquer du borax en France. Le ministre de l’intérieur, Adolphe Thiers, refuse cette demande.

A noter que François Prat, via la société où il est associé à sa belle-mère « Vedova Chemin e Prat », sera en 1818 locataire des lacs et un temps associé à François  Larderel4.

Activités professionnelles

En complément de son activité de pharmacien à Briançon, JJL Chancel devint un chimiste distingué et publia des articles remarqués dans le monde scientifique, en particulier sur les eaux de Font-Chaude et de la Rotonde au Monétier5, sur un empoisonnement des bestiaux par le pain d’amandes du prunier des Alpes et sur son contre-poison6, sur l’huile amygdaline du prunier des Alpes7

Famille

Le 26 septembre 1808, il épouse à Gènes Marie Catherine Brian, dite Marina Brian. La famille Brian est originaire de Val des Pré et installée à Gènes8. A noter que sa mère, Elisabeth Clavier, originaire de Val des Près, refuse de donner son consentement à ce mariage9.

Ils ont douze enfants :

  1. Marie Clara Léoladie Chancel (1810-1824),
  2. Clodomire Chancel (1811-1871),
  3. Paul Chancel (1817-1881),
  4. Lucien Edouard Chancel (1819-1822),
  5. Evariste Alphonse Honoré Chancel (1820-1882),
  6. Félicie Ernestine Chancel (1821-1879),
  7. Théophile Augustin Chancel (1822-1824),
  8. Aline Agathe Chancel (1824-1824),
  9. Marius Chancel (1827-1880),
  10. Germaine Chancel (1831-1831),
  11. Léontine Chancel (1831-1832),
  12. Nathalie Chancel (1834-1887).

Jean-Joseph-Louis Chancel meurt à son domicile, probablement de la grippe, le 18 février 183710.

Notes et références

Bibliographie

Références